De 12 à 87 ans, âge de sa mort, le narrateur a tenu le journal de
son corps. Nous qui nous sentons parfois si seuls dans le nôtre, nous
découvrons peu à peu que ce jardin secret est un territoire commun. Tout
ce que nous taisions est là, noir sur blanc, et ce qui nous faisait si
peur devient souvent matière à rire. Daniel Pennac a choisi de lire ici
les trois versions adaptées par lui pour le Théâtre des Bouffes du Nord
en 2012. Celles-ci, intitulées «La peur», «Le père» et «La fille»,
complémentaires dans leurs thématiques respectives, forment un tout. Un
corps. Un «corps commun», selon la propre expression de Daniel Pennac.
Son interprétation extraordinairement vivante ajoute au journal la
dimension personnelle que seul l'auteur incarnant le narrateur était en
mesure de rendre. Daniel Pennac se fait lecteur et nous livre sans
tabou, avec beaucoup de tendresse et d'émotion, cet étonnant journal
intime.
Biographie de l'auteur
Daniel Pennac, de son vrai nom Daniel Pennacchioni, est né le 1er
décembre 1944 à Casablanca, au Maroc. Il est le quatrième et dernier
d'une tribu de garçons. Son père est militaire. La famille le suit dans
ses déplacements à l'étranger -Afrique, Asie, Europe- et en France,
notamment dans le village de La Colle-sur-Loup, dans les
Alpes-Maritimes. Quand il évoque son père, il l'assimile à la
lecture : «Pour moi, le plaisir de la lecture est lié au rideau de fumée
dont mon père s'entourait pour lire ses livres. Et il n'attendait
qu'une chose, c'est qu'on vienne autour de lui, qu'on s'installe et
qu'on lise avec lui, et c'est ce que nous faisions.» Daniel passe une
partie de sa scolarité en internat, ne rentrant chez lui qu'en fin de
trimestre. De ses années d'école il raconte : «Moi, j'étais un mauvais
élève, persuadé que je n'aurais jamais le bac.» Toutefois, grâce à ses
années d'internat, il a pris goût à la lecture. On n'y permettait pas
aux enfants de lire, comme il l'évoque dans "Comme un roman" : « En
sorte que lire était alors un acte subversif. À la découverte du roman
s'ajoutait l'excitation de la désobéissance...».Ses études de lettres le
mènent à l'enseignement, de 1969 à 1995, en collège puis en lycée, à
Soissons et à Paris. Son premier livre, écrit en 1973 après son service
militaire, est un pamphlet qui s'attaque aux grands mythes constituant
l'essentiel du service national : l'égalité, la virilité, la maturité.
Il devient alors Daniel Pennac, changeant son nom pour ne pas porter
préjudice à son père.En 1979, Daniel Pennac fait un séjour de deux ans
au Brésil, qui sera la source d'un roman publié vingt-trois ans plus
tard : "Le Dictateur et le hamac".Dans la Série Noire, il publie en
1985, "Au bonheur des ogres", premier volet de la saga de la tribu des
Malaussène (dont on retrouvera le «petit» dans "Kamo. L'idée du
siècle").Daniel Pennac continue sa tétralogie avec "La Fée Carabine"
puis "La petite marchande de prose" et "Monsieur Malaussène" (il y a
ajouté depuis "Aux fruits de la passion"). Il diversifie son public avec
une autre tétralogie pour les enfants, mettant en scène des héros
proches de l'univers enfantin, préoccupé par l'école et
l'amitié : "Kamo, l'agence Babel", "Kamo et moi", "L'évasion de Kamo" et
"Kamo, l'idée du siècle". Ces romans sont-ils le fruit de souvenirs
personnels ? «Kamo, c'est l'école métamorphosée en rêve d'école, ou en
école de rêve, au choix.»À ces fictions s'ajoutent d'autres types
d'ouvrages : un essai sur la lecture, "Comme un roman", deux ouvrages en
collaboration avec le photographe Robert Doisneau et "La débauche", une
bande dessinée, avec Jacques Tardi.Il a mis fin en 1995 à son métier
d'enseignant pour se consacrer entièrement à la littérature. Toutefois,
il continue d'avoir un contact avec les élèves en se rendant
régulièrement dans les classes.